La guerre des mots

La dictature de l’économie racontée aux enfants !
Il était une fois les chiffres qui ont pris le pouvoir sur les mots. Ah, c’est un peu embêtant.
Tout y est signifié de manière très simple et efficace. Les images sont essentielles, extrêmement parlantes : le laisser aller par dépit, le pouvoir et l’arrogance de briller seul, la révolte groupée, la guerre très primaire, sans merci, la victoire par la négation de l’autre, qui au final ne sert à rien et le compromis, salvateur et constructif. Cet album est soutenu par Amnesty International. On aurait presque l’impression d’un livre grave et sérieux.
Eh bien pas du tout : les lettres et les chiffres aux lignes claires et droites et aux couleurs très pétantes se détachent de pages toutes noires. C’est surprenant, ça interpelle. Tout ce petit monde a finalement une bonne bouille, qui prête à sourire. Il y a une correspondance assez géniale entre le texte et le graphisme de laquelle naît une nouvelle idée. Au tout début, les mots sont malmenés, ils se laissent aller, un gros « fat » et un énorme « moult » se prélassent devant la télé, avec pizzas, chips et canettes. Et puis les situations cocasses s’enchaînent : on fait un test de vision avec des chiffres, les lunettes posées sur la table, on bichonne des numéros avant qu’ils passent à la télé. Jusqu’à la révolte groupée des lettres, s’ensuit un affrontement très primaire. Certes la situation se renverse, mais c’est tout aussi ridicule, pas très pratique. Les situations cocasses s’enchaînent : dans une file d’attente, « vous êtes juste derrière la petite dame avec les cheveux mauves. » J’adore. Le réveil écrit « debout ». Et alors, j’aime particulièrement l’idée que les hommes, de nouveau amoureux des mots, vont déterrer les très anciens, à la manière d’affreux profanateurs qui vont réveiller les morts.
Ça devrait plaire à beaucoup de monde, ça semble tout simple alors qu’il y a je crois plusieurs niveaux de lecture. Et puis c’est drôle.

Lisa